Instaurez les passeports vaccinaux et… santé!
Passeport, s’il vous plaît. Avant la pandémie de COVID-19, cette phrase évoquait des visions de vacances à la plage ou de voyages vers des contrées lointaines. La dernière fois que quelqu’un me l’a demandé, je voyageais en Inde; je ne me doutais pas que la prochaine fois que ça se produirait pourrait bien être au Kelsey’s du coin. Tel est le monde dans lequel nous vivons maintenant; «Black Mirror» n’aurait pas pu proposer un scénario plus étrange.Alors que je montrerais volontiers une quelconque preuve pour prendre un verre parmi les vaccinés, tout le monde ne partage pas cette opinion. «Nous n’allons pas avoir une société divisée», déclarait récemment le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford. «Nous avons été très clairs depuis le début que nous ne faciliterons pas l’implantation ni n’accepterons les passeports vaccinaux», a déclaré le premier ministre de l’Alberta, Jason Kenney. La justification anti-passeport des premiers ministres va de la création de deux catégories de citoyens à la violation des règles de confidentialité, mais est enracinée dans une réalité bien claire: leur base politique n’aime pas l’idée.Selon Abacus Research, alors que 89% des électeurs de centre-gauche pensent qu’une seconde dose de vaccin est essentielle pour mettre fin à la pandémie, seuls 70% des électeurs de centre-droit pensent la même chose, 17% déclarant que c’est une idée franchement mauvaise. Seuls 3% des électeurs de centre-gauche partagent ce point de vue.Et bien qu’une nette majorité de Canadiens appuient l’idée de passeports vaccinaux pour certaines activités, les taux sont nettement inférieurs chez les non-vaccinés. Alors que 80% des Canadiens vaccinés appuient l’idée d’un passeport pour les événements en salle, par exemple, seulement 51% des Canadiens non vaccinés le font.Ainsi, plutôt que de risquer la colère de leurs supporters qui résistent aux vaccins, les deux premiers ministres ont capitulé. Le résultat laisse les citoyens et les entreprises dans l’embarras; plus libres de reprendre leur vie d’avant la pandémie, mais à leurs risques et périls.En Ontario, c’est une contradiction étonnante pour un premier ministre qui, en 2018, avait installé des panneaux indiquant «Bienvenue en Ontario: prête à faire des affaires» à la frontière des États-Unis. La seule chose que le monde des affaires réclame avant tout, c’est la certitude. Il ne veut pas être sur la ligne de front de la santé publique. Il ne veut pas avoir à trancher entre les préférences de sa clientèle vaccinée et non vaccinée. Pourtant, sans système de passeport, c’est exactement ce que Ford lui demande de faire.En Alberta, pendant ce temps, la province lève toutes les restrictions, y compris l’obligation de vous mettre en quarantaine si vous êtes testé positif pour le virus; après le 16 août, ce sera recommandé, mais pas obligatoire. «Nous devons nous habituer au fait que les cas ne correspondent plus à des niveaux élevés d’hospitalisations ou de décès», a déclaré Kenney. «Nous nous concentrons sur les vaccins plutôt que sur les restrictions.»C’est bien beau, mais actuellement, seulement 55% de la population de l’Alberta est complètement vaccinée, et Kenney s’attend à ce que 10% des Albertains ne se fassent pas vacciner quoi qu’il arrive. Cela laisse des millions de personnes telles des boîtes de Pétri vivantes, capables d’être atteintes du virus et de lui permettre de muter potentiellement en une souche plus dangereuse. La semaine dernière, les Centres pour le contrôle et la prévention des maladies des États-Unis ont déclaré que la variante Delta était 1000 fois plus contagieuse que le virus SARS-CoV-2 d’origine, capable de provoquer des infections majeures chez les personnes vaccinées qui peuvent ensuite la transmettre à d’autres.Mémo à Ford et Kenney: si vous voulez vraiment que les gens se fassent vacciner, vous devez leur donner une incitation. Et cette incitation est un accès sûr à leur vie pré-pandémique. Après que la France eut annoncé que des «laissez-passer santé» seraient nécessaires pour accéder aux espaces fermés comme les cafés, les restaurants, les théâtres et les trains, quatre millions de personnes ont reçu leur première injection en deux semaines et près de six millions d’autres ont pris rendez-vous. L’exigence similaire de «laissez-passer vert» de l’Italie a vu les taux de vaccination augmenter de 15 à 200%, selon la région.Oui, il y a eu des manifestations. Oui, tout le monde n’est pas d’accord. Mais avec la variante Delta à la hausse en Europe et partout ailleurs, y compris au Canada, l’autre option est de tout fermer à nouveau, ce qui serait bien pire.Nous vivons dans un pays libre. Les gens ont le droit de se faire vacciner ou non. Mais leur choix ne doit pas l’emporter sur celui des autres, et la politique non plus. Instaurez les passeports vaccinaux et… santé!Lire la version originale anglaise de ce texte sur le site du National Post