Trudeau prendra-t-il au sérieux la politique chinoise de son gouvernement?
Alors que les yeux du monde regardent le brave peuple chinois se soulever contre son gouvernement, exigeant la liberté sous peine de mort, le gouvernement du Canada a dévoilé sa stratégie Indo-Pacifique tant attendue. Cela inclut une nouvelle «compréhension lucide» de la Chine.«L’essor de la Chine, rendu possible par les mêmes règles et normes internationales que ce pays méprise de plus en plus, a eu un énorme retentissement sur la région indo-pacifique», indique le document. «La Chine investit à grande échelle pour établir son influence économique, sa présence diplomatique, ses capacités militaires offensives et ses technologies de pointe. Elle cherche à façonner l’ordre international pour en faire un environnement plus permissif à l’égard d’intérêts et de valeurs qui s’écartent de plus en plus des nôtres.»L'évaluation n'est pas fausse, mais son utilisation du temps présent est risible. La Chine fait ces choses depuis des décennies, au Canada et partout dans le monde. Son initiative «Belt and Road» a favorisé les intérêts économiques chinois grâce à la construction de projets d'infrastructure massifs dans les pays en développement, souvent au prix d'un endettement important. Ses Instituts Confucius ont diffusé l'histoire révisionniste du Parti communiste pro-chinois à neuf millions d'étudiants dans 525 instituts situés dans 146 pays et régions, édulcorant des événements comme le soulèvement de la place Tiananmen et encourageant les campus à ne pas autoriser les présentations de conférenciers comme le Dalaï Lama.De plus, selon la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, «Ce que j'ai dit à maintes reprises à ce stade, c'est que nous contesterons quand nous le devrions et nous coopérerons quand nous le devrons.» La stratégie du gouvernement énumère une foule de points de «coopération» avec la Chine: «les changements climatiques et la perte de biodiversité, la santé mondiale ainsi que la prolifération nucléaire. Et l’économie chinoise présente des débouchés importants pour les exportateurs canadiens.»Avec le vaste marché de la Chine, ces opportunités peuvent sembler illimitées, mais la part de la Chine dans le commerce canadien ne l'est pas. Soixante-treize pour cent de nos exportations sont destinées aux États-Unis, moins de cinq pour cent à la Chine. Compromettre notre sécurité nationale et notre démocratie vaut-il 19 milliards de dollars de produits agricoles et de matières premières? Au lieu de développer le commerce avec une Chine autocratique, le Canada devrait rechercher des opportunités accrues avec les nations démocratiques, y compris l'Inde, ce que la stratégie recommande sous la forme de propositions de pourparlers de libre-échange.Quant au changement climatique, la Chine s'est montrée peu disposée à coopérer. Il y a trois semaines à peine, lors de la COP27, le président chinois Xi Jinping a déclaré que la Chine n'avait aucune obligation de participer à un fonds mondial de compensation climatique et a plutôt souligné sa solidarité avec les pays appelant à plus d'action de la part des pays développés.La stratégie soulève quelques points importants, notamment en soulignant la nécessité de faire la différence entre les actions du gouvernement chinois et celles du peuple chinois. Elle vise également à approfondir la collaboration avec la Corée du Sud et le Japon et à accroître la présence militaire du Canada dans l'Indo-Pacifique, bien qu'avec nos forces de défense ayant déjà atteint leur limite, il est difficile de voir comment le Canada pourra le faire sans une injection massive de fonds et de personnel.Et la stratégie laisse également de côté des éléments clés pour contrer l'ingérence étrangère, notamment la création d'une loi sur l'enregistrement des agents étrangers (FARA), pour suivre le lobbying des entreprises financées par le PCC et de leurs représentants, ce que les conservateurs de l'opposition réclament depuis des années.La plus grande question, cependant, est de savoir comment le premier ministre Justin Trudeau agira. Au cours des sept dernières années, Trudeau et son gouvernement n'ont pas réussi à contenir la croissance de l'influence chinoise, qui a imprégné la politique canadienne au point que Global News a récemment rendu compte du financement de 11 candidats canadiens par le PCC aux élections de 2019, information qui aurait été transmise au premier ministre en janvier 2022.À cela, Trudeau a répondu que «nous voyons des pays… que ce soit la Chine ou d'autres, continuent de jouer à des jeux agressifs avec nos institutions, avec nos démocraties», mais a ensuite nié avoir été informé de la question. Pendant ce temps, lui et ses députés ont esquivé la question à la Chambre des communes pendant plus d'une semaine, accusant les conservateurs de fomenter de «fausses inquiétudes».Ce n'est pas le moment de faire du «whataboutisme» ou de tomber dans la partisanerie; c'est le temps de faire preuve de leadership. À moins que Trudeau n'aille plus loin, ne légifère sur l'enregistrement des agents étrangers et ne prenne des mesures concrètes contre l'ingérence, le Canada – et les Canadiens d'origine chinoise – ne seront pas plus à l'abri de l'influence étrangère. Et la nouvelle stratégie ne sera rien d'autre qu'un tigre de papier.Lire la version originale anglaise de ce texte sur le site du National Post