Santé : les Canadiens ne devraient pas mourir à cause d'une idéologie
Les soins de santé au Canada sont en crise. La patiente n'est pas seulement malade; elle est sous assistance respiratoire, s'accrochant à peine à la vie. Les pénuries de personnel et les retards de traitement engendrés par la pandémie ont fait déborder le vase, submergeant un système en déclin depuis des décennies. Privé d'argent, d'innovation et de concurrence, il s'est effectivement effondré et les résultats sont tout simplement désastreux.Des patients meurent aux urgences. Il a été rapporté la semaine dernière qu'une mère de trois enfants en Nouvelle-Écosse, Allison Holthoff, a attendu sept heures à l’urgence avant de laisser tomber et de mourir à la maison. La veille, une autre femme de la Nouvelle-Écosse était décédée des suites d’une épreuve similaire. Dans l'ensemble, les décès dans les salles d'urgence de la Nouvelle-Écosse ont augmenté de 10% en 2022: 558 personnes sont décédées l'an dernier, contre 505 en 2021.Des patients meurent sur des listes d'attente pour une chirurgie. Une analyse des dossiers de santé de l'Ontario publiée par SecondStreet.org en août 2022 a révélé que 1417 Ontariens sont décédés en attendant une intervention chirurgicale en 2021-2022, une augmentation de 43,7% par rapport aux chiffres d'avant la pandémie et une augmentation de 34,6% par rapport à la moyenne des quatre années pré-pandémiques.Des patients meurent en attendant de voir un spécialiste. En septembre 2022, un million de patients en Colombie-Britannique figuraient sur des listes d'attente pour voir un spécialiste. Et cela, pour des questions allant de la physiothérapie aux biopsies du cancer. Les temps d'attente pour certains services étaient quatre fois plus élevés qu'au début de la pandémie. Des dizaines de médecins ont envoyé une lettre au ministre provincial de la Santé, disant: «C'est très dur d'être incapables de fournir les soins spécialisés dont les patients de la Colombie-Britannique ont besoin et méritent.»Cette situation est tout à fait inacceptable, surtout dans un pays qui devait dépenser 331 milliards de dollars, soit 8 563 $ par Canadien, en soins de santé en 2022, selon l'Institut canadien d'information sur la santé. En 2020, les dépenses du Canada étaient de 7507 $ par habitant, les quatrièmes plus élevées de l'OCDE et bien au-dessus de la moyenne de l'OCDE de 5502 $. Pourtant, nous n'en avons pas pour notre argent: le Canada obtient un score inférieur à la moyenne en matière de sécurité des patients, inférieur à la moyenne dans de nombreux domaines d'accès aux soins et à peine supérieur à la moyenne en matière de qualité des soins, par rapport à ses pairs.Que disent et font nos politiciens à ce sujet? En réponse à la mort de Mme Holthoff, le bureau du ministre fédéral de la Santé, Jean-Yves Duclos, a déclaré que «personne ne devrait vivre» ce qu'elle et sa famille ont enduré. En réponse à la lettre des spécialistes, le ministère de la Santé de la Colombie-Britannique a déclaré «nous écouteront toujours les médecins lorsqu'ils ont des préoccupations ou des suggestions sur la façon d'améliorer les services». Et cette semaine, le premier ministre Justin Trudeau a promis plus de dollars fédéraux aux gouvernements provinciaux qui réclament des fonds supplémentaires depuis des années. «Il y a un besoin pour plus d'argent», a déclaré Trudeau, énonçant une évidence. «Il faut faire plus et produire des résultats pour les familles.»Mais il y a aussi un besoin de réforme. En Ontario, le premier ministre Doug Ford a annoncé une série de changements à la prestation des soins de santé, notamment en permettant aux pharmaciens de renouveler les ordonnances et de prescrire des médicaments pour certaines conditions, et en faisant en sorte que les cliniques privées effectuent davantage de chirurgies de la cataracte, d'IRM et d'arthroplasties de la hanche et du genou, payées par la province. En Alberta, la première ministre Danielle Smith envisage de créer des comptes de dépenses de santé – non pas pour remplacer les soins de santé publics, comme on lui avait reproché de vouloir faire –, mais comme un «complément» visant à injecter plus de fonds dans le système. Et lors de la dernière campagne électorale québécoise de septembre 2022, le premier ministre François Legault a promis d'augmenter le nombre de cliniques privées dans sa province et de permettre la construction d’un «mini hôpital» privé par le secteur privé, mais où l’on offrirait des services payés par l'État.Ces politiques ne relèvent pas seulement du gros bon sens, elles se font attendre depuis bien longtemps. Elles sont aussi en phase avec l'opinion publique. Un sondage réalisé par Ipsos en 2022 pour l'Institut économique de Montréal a révélé que 58% des Canadiens croient que le gouvernement devrait permettre un accès accru aux soins de santé privés tant qu'ils sont payés par le gouvernement. Les recherches effectuées par la firme d'affaires publiques Navigator ont révélé que 62% des résidents du Québec souhaitent voir l’offre de services privés augmenter afin de réduire la pression sur le système public, et que 72% des baby-boomers canadiens disent être en faveur d'une plus grande participation du secteur privé dans le secteur de la santé si cela signifie que chaque Canadien puisse accéder aux soins dont il ou elle a besoin.En matière de soins de santé, il y a à la fois un besoin et un désir de changement. Les gens ne devraient pas mourir pour une idéologie. Les gouvernements ont besoin de liberté et de fonds pour réunir tous les partenaires autour d’une même table et s'assurer que les Canadiens obtiennent les soins de santé qu'ils méritent.Lire la version originale anglaise de ce texte sur le site du National Post